Droit aux congés payés durant un arrêt de travail

Après le Sénat, adoption définitive par l’Assemblée nationale le 10 avril 2024 du projet de loi dit « DDADUE » mettant en conformité le Code du travail avec le droit européen.

Pour mémoire, par plusieurs arrêts en date du 13 septembre 2023, la Cour de cassation a jugé les dispositions du Code du travail ne donnant pas lieu à acquisition de droits à congés en cas d’accident ou de maladie sans caractère professionnel, contraires à la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (n° 22-17.340 ; n° 22-17.638 ; n° 22-10.529).

 

Compte tenu du risque d’insécurité juridique encouru, le Gouvernement a engagé le 15 novembre 2023, la procédure accélérée pour le vote d’un projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière d’économie, de finances, de transition écologique, de droit pénal, de droit social et en matière agricole.

Désormais, toute période d’arrêt de travail pour maladie ou accident, professionnel ou non professionnel, est considérée comme du temps de travail effectif, permettant au salarié d’acquérir des congés payés.

Ainsi, aux termes du nouvel article L. 3141-5-1 du Code du travail, il est prévu que la période d’arrêt de travail pour accident ou maladie non professionnel génère un droit à congés payés de 2 jours ouvrables par mois, dans la limite de 24 jours ouvrables, soit 4 semaines par an.

Le texte instaure donc un régime différent entre les salariés en arrêt de travail pour accident ou maladie non professionnel et les salariés effectivement en activité ou en arrêt de travail pour accident ou maladie professionnel, pour lesquels la loi prévoit 2,5 jours de congés par mois, soit 5 semaines par an.

Par conséquent, sur une même période d’acquisition de référence, le salarié pourra se voir appliquer deux régimes différents d’acquisition des congés payés.

 

LE REPORT DES CONGÉS PAYES ET L’OBLIGATION D’INFORMATION CORRÉLATIVE :

Par principe, pour le salarié en arrêt de travail, qui est par conséquent dans l’impossibilité de prendre ses congés payés, la nouvelle loi instaure une période de report de 15 mois des congés payés acquis non pris au terme duquel les congés expireraient définitivement (Art. L. 3141-19-1 c. trav.).

Un accord d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, une convention ou un accord de branche peut fixer une durée de la période de report supérieure (Art. L. 3141-21-1
c. trav.).

Parallèlement, une nouvelle obligation d’information est mise à la charge de l’employeur qui, dans un délai de 1 mois suite au retour du salarié dans l’entreprise après un arrêt maladie ou accident, doit l’aviser (Art. L. 3141-19-3 c. trav.) :

  • Du nombre de jours de congés dont il dispose ;
  • De la date jusqu’à laquelle ils peuvent être pris.

Ces informations pourront être communiquées au salarié par tout moyen conférant une date certaine à leur réception, notamment via le bulletin de paie.

 

En l’absence d’accord collectif, le point de départ du délai de report sera fixé comme suit :

  • Congés acquis avant un arrêt maladie : 15 mois à compter de la date à laquelle l’employeur a informé le salarié de ses droits, après la reprise du travail ;
  • Congés acquis pendant un arrêt maladie inférieur à 1 an : 15 mois à compter de la date à laquelle l’employeur a informé le salarié de ses droits, après la reprise du travail ;
  • Congés acquis pendant un arrêt maladie supérieur ou égal à 1 an : 15 mois à compter de la fin de la période au cours de laquelle les congés ont été acquis. Si le salarié reprend le travail alors que la période de report n’a pas expiré, elle serait suspendue jusqu’à ce que l’employeur l’ait informé de ses droits.

 

LA RÉTROACTIVITÉ DE LA LOI :

Afin de sécuriser la situation passée, la loi limite la rétroactivité des dispositions, pour la période courant du 1er décembre 2009 à la date d’entrée en vigueur de la loi, soit le 24 avril 2024. Il est cependant précisé que, les congés supplémentaires acquis ne peuvent, pour chaque période de référence, excéder le nombre de jours permettant au salarié de bénéficier de 24 jours ouvrables de congé, après prise en compte des jours déjà acquis.

 

LES DÉLAIS DE RECOURS :

Un régime différent s’appliquera selon que le salarié soit toujours en poste ou ait quitté l’entreprise :

  • Pour les salariés encore en poste, la loi instaure un délai de forclusion de 2 ans à compter de la date d’entrée en vigueur de loi, soit le 24 avril 2024, pour agir en justice pour l’octroi de jours de congés.
  • Pour les anciens salariés, ils seront soumis à la prescription triennale classique de l’article L3245-1 du Code du travail. Ils pourront ainsi obtenir des indemnités compensatrices de congés payés, mais sous réserve de précision, si le recours a lieu dans le délai triennal, seuls les droits qui auraient été acquis au titre des trois dernières années du contrat pourraient être réclamés. Pour la détermination de la rémunération brute servant de base au calcul de l’indemnité de congés payés pour l’application de la règle du 10e, la rémunération prise en compte est toutefois limitée à 80 %.
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