Absence de responsabilité et de remboursement de la banque en cas d’opération frauduleuse

Absence de responsabilité et de remboursement de la banque en cas d’opération frauduleuse

Cour de cassation, Chambre commerciale, 15 janvier 2025, E23-15.437

Cour de cassation, Chambre commerciale, 15 janvier 2025, E23-13.579

Par deux arrêts rendus le 15 janvier 2025, la Cour de cassation a écarté la responsabilité de la Banque de payeurs victimes de fraude en cas de négligence grave du client et en cas de virement effectué sur la base d’un identifiant bancaire fourni par leur client, mais qui ne vise pas le bon bénéficiaire.

 

En ce début d’année 2025, la Cour de cassation a eu l’occasion de préciser dans quelles circonstances les banques n’étaient pas tenues de rembourser leur client victime d’une fraude.

Dans un contexte où les fraudes et escroqueries bancaires se multiplient, la Cour de cassation a publié un communiqué le 15 janvier 2025 pour mettre en lumière deux arrêts rendus le même jour dans lesquels les banques n’ont pas été tenues de procéder au remboursement au profit des victimes.

 

Absence de remboursement lorsque le client a transmis un ordre de virement contenant un RIB erroné

Dans l’affaire soumise à la Cour, un couple souhaitant acheter un véhicule avait ordonné deux virements en se basant sur un IBAN transmis par email par le vendeur.

Le vendeur, n’ayant pas perçu les fonds, il s’est aperçu qu’un tiers avait piraté sa boîte email et avait modifié l’IBAN à son insu.

Le couple a alors assigné sa banque en restitution des fonds et en dommages et intérêts.

Dans un premier temps, la Cour d’appel saisie de l’affaire a retenu que si la banque ne pouvait voir sa responsabilité engagée lorsqu’elle a exécuté un paiement alors que son client lui fournit un mauvais IBAN, la banque avait tout de même manqué à son obligation de vigilance, l’IBAN présentant des anomalies apparentes qu’elle devait relever.

La Haute juridiction casse cet arrêt, en rappelant :

D’une part, et comme cela a été constaté par la Cour d’appel, que sur le fondement de l’article L133-21 du code monétaire et financier, une banque qui exécute un virement en se fondant sur un IBAN fourni par son client ne peut être tenue responsable de l’opération de paiement, même lorsque l’IBAN a été antérieurement falsifié à la suite d’un piratage informatique ;

D’autre part, que l’application du régime spécial de responsabilité prévu par l’article L133-21 du code monétaire financière exclu l’application de tout autre régime de responsabilité de droit commun.

La Cour d’appel, ayant écarté la responsabilité de la banque en application du droit spécial du code monétaire et financier, ne pouvait la condamner sur le fondement d’un devoir de vigilance, fondé sur un régime de responsabilité de droit commun, à savoir l’article 1231-1 du code civil.

Par conséquent, la Cour de cassation, rappelle qu’un client ayant transmis un mauvais IBAN ne peut prétendre à un remboursement des opérations, ni sur le fondement d’une opération non autorisée ou mal exécutée, ni sur un défaut du devoir de vigilance de la banque.

Absence de remboursement en cas de négligence grave du client

Dans la seconde affaire soumise à la Cour, deux sociétés ont été victimes d’une fraude dite du « cheval de Troie ».

Il s’agit d’une escroquerie où les fraudeurs adressent un courriel à une personne contenant une pièce jointe ou un lien infecté par un virus informatique qui permet au fraudeur de prendre le contrôle de l’ordinateur de la victime afin d’obtenir ses informations confidentielles pour lui permettre d’effectuer des virements.

En l’espèce, des sociétés avaient été « infectées » par un tel logiciel après l’ouverture d’un courriel malveillant par un salarié et le fraudeur avait pu ordonner six virements depuis l’ordinateur du salarié de la société.

Face au refus de remboursement de leur banque, les sociétés victimes ont agi en justice et la Cour d’appel a, dans un premier temps, retenu un partage de responsabilité entre la Banque (considérant qu’elle avait manqué à son obligation de vigilance du fait des virements anormaux) et ses clients (considérant qu’ils avaient commis une négligence grave compte tenu du caractère manifestement trompeur des courriels frauduleux), condamnant la Banque à leur rembourser 50 % des sommes frauduleusement payées.

Toutefois, la Cour de cassation a cassé la décision de la Cour d’appel et dit n’y avoir lieu à remboursement par la banque dans la mesure où les clients avaient commis une négligence grave qui a rendu possible la réalisation des paiement frauduleux, et ce en donnant une suite aux courriels douteux que les sociétés avaient reçus.

Ainsi, lorsque la victime participe à la réalisation de son préjudice, elle est considérée comme ayant commis une négligence grave exonérant la responsabilité de la banque.

Par ces deux arrêts et leur communication, la Cour de cassation entend ainsi affiner les situations générales dans lesquelles la Banque est exonérée de rembourser les victimes de fraude et escroquerie bancaire.

 

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