La liquidation d’une succursale française est subordonnée à la communication d’informations suffisamment précises sur la situation financière de la société mère
9 mars 2022
TA Montreuil, 27 décembre 2021, n°2113571
Par cette décision du 27 décembre 2021, le Tribunal administratif de Montreuil vient préciser les exigences relatives à l’homologation d’un plan de sauvegarde de l’emploi (ci-après PSE) dans le cadre d’un redressement ou d’une liquidation judiciaire.
Après avoir rappelé les articles L.1233-61, L.1333-62 et L.1233-8 du Code du travail, le Tribunal administratif précise que :
« lorsque l’administration est saisie d’une demande d’homologation d’un document élaboré en application de l’article L.1233-24-4 du code du travail, il lui appartient (…) de vérifier, dans le cas des entreprises en liquidation judiciaire :
– d’une part, que le liquidateur a recherché, pour l’établissement du plan de sauvegarde de l’emploi, les moyens dont disposent l’unité économique et sociale et le groupe auquel l’entreprise appartient, et,
– d’autre part, que le plan de sauvegarde de l’emploi n’est pas insuffisant au regard des seuls moyens dont dispose l’entreprise ».
Les moyens auxquels il est fait référence sont notamment d’ordre financier (CE, 7 février 2018, n°397900).
Il en résulte que la décision d’homologation ne peut intervenir que si l’administration a eu accès à des informations suffisamment précises sur la situation financière de l’entreprise, de l’UES ou du groupe.
Tel n’était pas le cas en l’espèce puisque la DREETS n’avait reçu qu’une note économique et un extrait du compte de liquidation de la succursale française, lesquels ne contenaient aucune indication sur la situation financière mais l’informaient seulement des pertes et de l’état des actifs et de la trésorerie de la filiale.
C’est pourquoi le Tribunal administratif de Montreuil a annulé la décision d’homologation, jugeant que la DREETS n’avait pas été en capacité de contrôler la proportionnalité des mesures du PSE aux moyens de l’entreprise.
Si l’annulation d’une décision d’homologation d’un PSE ne rend pas le licenciement nul, ni le prive d’une cause réelle et sérieuse (Cass. Soc., 25 mars 2020, n°18-23.692), elle permet aux salariés de saisir le juge prud’homal afin d’obtenir une réparation de leur préjudice, à hauteur d’au moins six mois de salaire (article L.1233-58, II alinéa 7 du Code du travail).
Cette exigence supplémentaire dégagée par le Tribunal administratif de Montreuil revêt un intérêt majeur puisque l’indemnité est à la charge de l’employeur.
Lorsque la société liquidée est employeur, les salariés verront leur créance inscrite au passif de cette dernière.
Néanmoins lorsque l’entreprise liquidée est une succursale ne disposant pas de la personnalité morale, elle n’est pas l’employeur et n’est donc pas tenue de payer cette indemnité. En pareille hypothèse, la charge des indemnités dues reposerait sur la filiale ou la société mère ayant créé la succursale.
Dès lors, pour ne pas risquer d’être tenu de régler ces indemnités, l’employeur des salariés d’une succursale liquidée a intérêt à apporter des informations suffisamment précises sur sa situation financière pour ne pas voir la décision d’homologation annulée au motif que l’administration n’avait pas pu contrôler la proportionnalité desdites mesures.