L’affectation à un poste distinct de manière non temporaire et non contractualisée […]
9 octobre 2023
L’affectation à un poste distinct de manière non temporaire et non contractualisée constitue une modification du contrat de travail de sorte que la reprise des fonctions antérieures nécessite l’accord exprès du salarié
(Cass. soc., 21 juin 2023, n°22-13.514)
Une salariée a été engagée en octobre 2012 en qualité d’auxiliaire ambulancier.
À compter du mois de juin 2016, elle était affectée à un poste distinct de secrétaire à la facturation.
Sans recueillir son accord, son employeur décide en février 2018 de la réaffecter à son poste initial d’auxiliaire ambulancier.
Ne s’étant pas présentée, la salariée est licenciée pour faute grave au titre d’une absence injustifiée.
En appel, les juges ont estimé que son licenciement était bien fondé ; selon eux, la réaffectation de la salariée à son poste initial constituait une modification de ses conditions de travail et ne nécessitait donc pas son assentiment.
Ils avaient en outre relevé que l’affectation à des tâches administratives n’avait fait l’objet d’aucun avenant au contrat ni d’une quelconque formalisation par l’employeur alors que la Convention collective des transports routiers prévoit que le changement de poste « doit faire l’objet d’une notification écrite » (article 4 de l’annexe n°1 « ouvriers » du 16 juin 1961).
Les juges ont par ailleurs estimé que l’exercice d’un emploi distinct pendant près de 18 mois « n’a pas pour conséquence de priver d’effet le contrat de travail sur la désignation initiale de l’emploi » (CA Toulouse, 4ème ch. sect. 1., 1er oct. 2021, n°19/03462).
Pour les juges du fond, la faute grave était donc établie.
La Chambre sociale de la Cour de cassation saisie du sujet censure ce raisonnement.
La Cour juge qu’en étant affectée dans un emploi distinct n’ayant pas de caractère temporaire, l’accord de la salariée était nécessaire à sa réaffectation à son poste initial puisque cela constituait une modification de son contrat de travail.
Contrat de travail qui pourtant n’avait pas fait l’objet d’une modification s’agissant de l’affection initiale, car la notification écrite exigée par les dispositions conventionnelles n’avait pas eu lieu…
En d’autres termes, de son embauche à son licenciement, son poste de travail est contractuellement identique.
À notre sens, c’est la durée de l’affectation qui a été décisive, près de 18 mois dans ce cas.
C’est en effet ce qui ressort de la jurisprudence de la chambre sociale de la Cour de cassation (Cass. soc., 2 mars 1994, n°90-40.080 ; soc., 17 oct. 2007, n°05-42.525, soc., 20 janv. 2010, n°08-42.739).
Quand la Cour de cassation retient une interprétation factuelle pour remettre en cause une règle de droit…