Les ruptures conventionnelles doivent être prises en compte pour déterminer les obligations en matière de PSE
4 avril 2022
Cass. soc., 19 janvier 2022, n°20-11.962
En cas de licenciement pour motif économique d’au moins 10 salariés dans une période de 30 jours, dans les entreprises d’au moins 50 salariés, l’employeur doit mettre en œuvre la procédure de grands licenciements pour motif économique et notamment élaborer un plan de sauvegarde de l’emploi.
Le législateur afin d’éviter tout contournement de cette procédure, a prévu que cette règle serait applicable à tout nouveau licenciement prononcé par une entreprise ou un établissement employant habituellement au moins 50 salariés et qui a procédé pendant 3 mois consécutifs à des licenciements économiques de plus de 10 salariés au total, sans jamais atteindre 10 salariés dans une même période de 30 jours.
Dans un arrêt du 19 janvier 2022, la Cour de cassation rappelle qu’il faut pour déterminer l’obligation de mise en œuvre de la procédure de PSE, tenir compte des ruptures conventionnelles.
En l’espèce, un salarié a été licencié pour motif économique après la cession de son entreprise. Ce licenciement est intervenu dans un contexte de suppressions d’emplois, précédées par plusieurs ruptures conventionnelles. Contestant son licenciement, le salarié a décidé de saisir la juridiction prud’homale afin que son licenciement soit reconnu comme étant nul. Selon ce dernier, l’employeur aurait dû mettre en œuvre un plan de sauvegarde de l’emploi puisque les ruptures conventionnelles intervenues au cours des deux mois précédant les suppressions de postes s’étaient inscrites dans le cadre du projet de réorganisation de l’entreprise pour motif économique.
La Cour d’appel a débouté le salarié de sa demande. Pour elle, les emplois supprimés ne devaient pas s’ajouter aux ruptures conventionnelles, puisque ces dernières résultaient de l’application de la clause de cession. Ainsi, l’employeur n’était pas tenu d’élaborer un PSE.
La Cour de cassation a, quant à elle, censuré la décision de la Cour d’appel au motif que cette dernière avait constaté que « les ruptures conventionnelles étaient intervenues dans un contexte de suppression d’emploi dû à des difficultés économiques et qu’elles s’inscrivent dans un projet global et concerté de réduction des effectifs au sein de l’entreprise »
Cette solution n’est pas nouvelle. En effet, elle a déjà eu l’occasion d’indiquer que doivent être pris en compte les départs à la préretraite (Soc, 1er février 2011, n°09-70.121), les ruptures conventionnelles s’inscrivant dans un processus de réduction des effectifs pour une cause économique (Soc, 9 mars 2011, n°10-11.581) et sur ce dernier point, que seules sont prises en compte les ruptures homologuées par l’administration du travail (Soc, 29 octobre 2013, n°12-15.382).
Par ailleurs, une instruction ministérielle du 23 mars 2010 relative à l’incidence d’un contexte économique difficile sur la rupture conventionnelle d’un contrat de travail à durée indéterminée avait eu le même raisonnement.
Ainsi, il n’est pas interdit en cas de difficulté économique de rompre le contrat de travail par le biais d’une rupture conventionnelle mais la Cour de cassation est très attentive à ce que ce mode de rupture ne vienne pas contourner les règles concernant l’obligation de mettre en place un PSE.