L’offre d’indemnisation manifestement insuffisante et le préjudice en découlant pour les victimes privées du bénéfice d’une transaction amiable
4 décembre 2024
L’article L 1142-14 du Code la Santé publique, en son alinéa 9 dispose :
« Si le juge compétent, saisi par la victime qui refuse l’offre de l’assureur, estime que cette offre était manifestement insuffisante, il condamne l’assureur à verser à l’office une somme au plus égale à 15 % de l’indemnité qu’il alloue, sans préjudice des dommages et intérêts dus de ce fait à la victime. »
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A la lecture de ces dispositions, les victimes sont ainsi en droit de réclamer paiement de dommages et intérêts, lorsque l’offre formulée par la compagnie d’assurance qui garantit la responsabilité civile ou administrative de la personne considérée comme responsable, est estimée insuffisante.
Cela était confirmé par un arrêt rendu par le CE, 5e et 6e ch. Réunies le 21 mars 2023 ( n° 452939) qui avait annulé la décision rendue par la Cour Administrative d’appel de VERSAILLES, estimant que :
« Commet ainsi une erreur de droit la cour administrative d’appel qui, pour refuser de condamner l’assureur à indemniser le préjudice subi par les ayants droits de la victime du fait du caractère manifestement insuffisant de son offre d’indemnisation, juge que cet élément de préjudice ne se distingue pas des préjudices moraux que l’établissement de santé et son assureur ont été condamnés à indemniser. »
Ce préjudice s’appliquait donc aux offres émises par les compagnies d’assurance.
Récemment, le Tribunal Administratif de Rennes a rendu une décision marquante, élargissant ce préjudice aux offres formulées par l’ONIAM. (27 mars 2024, n° 1901456)
« Il résulte de ces dispositions qu’il appartient au juge, s’il est saisi de conclusions en ce sens par la victime, et s’il estime que l’offre d’indemnisation faite par l’ONIAM était manifestement insuffisante, de condamner l’office au paiement d’une indemnité destinée à réparer le préjudice en ayant résulté directement pour la victime.
Ce préjudice est constitué par le fait, pour la victime, de s’être vu proposer une offre d’indemnisation manifestement insuffisante au regard du dommage subi et d’avoir dû engager une action contentieuse pour en obtenir la réparation intégrale en lieu et place de bénéficier des avantages d’une procédure de règlement amiable. »
Cette décision est ainsi remarquable, ce que le Tribunal Administratif a rapidement transposé la jurisprudence rendue une année plus tôt par le Conseil d’Etat, en étendant son principe sur le préjudice subi par la victime, contrainte à engager une procédure, peut importe que l’auteur de l’offre soit in fine, un organisme privé (compagnie d’assurance) ou public, en l’espèce l’ONIAM.
Le cadre initial de la procédure engagée par la victime étant indifférent à ce préjudice spécifique.
Ainsi, qu’il s’agisse d’une demande initiale fondée sur la faute médicale, ou à contrario sur le risque médical entraînant des conséquences anormales, le fait pour une victime d’être contrainte à engager une procédure et d’être privée d’une transaction amiable constitue un préjudice distinct trouvant son origine dans la faute commise par l’organisme régleur de l’indemnisation.
Il sera donc indispensable de rapporter la preuve d’une faute pour obtenir l’indemnisation de ce préjudice, en démontrant le caractère manifestement insuffisant de l’offre formulée.
Il n’est pas anodin de finalement constater qu’un organisme public, se doit de respecter les mêmes obligations et règles imposées aux organismes privés.