Pacte d’actionnaires, de l’entrée à la sortie du capital d’une société
3 juillet 2024
- Introduction et définition
Le pacte d’actionnaires (pour les sociétés par actions) ou le pacte d’associés (pour les sociétés ayant des parts sociales) est un contrat régissant les rapports entre plusieurs porteurs de titres (terme générique recouvrant action et part sociale) d’une société (nous allons par simplicité les appeler actionnaires pour la suite de l’article). L’objectif de cette convention extra-statutaire sera d’éviter les conflits entre ses signataires, combler certaines lacunes des statuts et anticiper l’entrée et la sortie au capital de la société.
L’intérêt de ce document repose sur son caractère confidentiel. En effet, seuls les signataires du pacte ont connaissance de celui-ci et ses dispositions sont inopposables aux tiers et aux actionnaires non parties au contrat. Il se distingue donc des statuts qui sont publics et concernent l’ensemble de l’actionnariat, les dirigeants et les tiers.
Toutefois, en cas de violation des dispositions du pacte, l’actionnaire fautif s’expose au versement de dommages et intérêts, mais la nullité de l’acte n’est pas toujours encourue, cela dépend de sa rédaction.
De ce fait, il sera alors possible, par le biais de certaines clauses, d’y organiser les modalités d’entrée au capital, de cessions de titres et de s’accorder sur la gouvernance au cours de la vie de l’entreprise.
- L’entrée au capital de la société
L’un des objectifs principaux du pacte d’actionnaires est de décider qui pourra entrer au capital de la société. Pour cela, les actionnaires parties à la convention useront de différents mécanismes juridiques.
- Clause d’agrément si elle n’est pas contenue dans les statuts
La clause d’agrément prévoit que toute cession de titres doit être soumise à l’accord préalable des autres actionnaires. Ce procédé pouvant s’appliquer autant à une cession de titre à un tiers qu’à un actionnaire déjà présent au capital. De ce fait, les signataires vont pouvoir décider de l’adhésion de nouveaux actionnaires dans la société en conditionnant la cession des titres à l’accord majoritaire ou unanime des actionnaires. Les règles de majorités relatives à l’agrément pouvant être librement fixées par les actionnaires qui ont signé le pacte.
- Clause de préemption
Lorsqu’un actionnaire souhaite céder des titres, les autres parties au pacte vont bénéficier d’un droit de préemption (ou préférence) sur les titres cédés. En effet, le cédant doit nécessairement prévenir de la vente et les autres actionnaires seront prioritaires pour l’acquisition des titres concernés. Ce mécanisme permet d’éviter que des tiers intègrent le capital de la société et ainsi, conserver plus de contrôle sur la société.
Il est tout de même nécessaire de bien encadrer les modalités en mentionnant les opérations visées, les notifications aux actionnaires, les délais, les conditions de prix et la répartition des actions préemptées (dans le cas ou plusieurs associés souhaitent bénéficier de la préemption).
- Clause d’inaliénabilité
L’inaliénabilité ou incessibilité est un mécanisme ferme pour gérer les mouvements de titres et donc l’entrée au capital d’une société : on interdit la cession des titres pendant une période donnée.
Il existe toutefois des limites, les clauses d’inaliénabilité doivent nécessairement être limitées dans le temps, conformément à l’article 900-1 du Code civil. Il convient donc de prévoir un terme à cette clause sinon elle pourrait encourir la nullité.
Il conviendra également de mentionner les actionnaires du pacte qui sont visés par l’incessibilité, la portée (totale ou partielle) de la clause, le type de cessions interdites et les exceptions.
- Clause anti-dilution
Lorsque la société bénéficie de financements, notamment par une levée de fonds, la clause anti-dilution protège la participation d’un actionnaire en maintenant sa détention capitalistique. L’objectif est de conserver, le plus possible, l’actionnariat originel de la société et donc garantir sa stabilité. En effet, l’actionnaire va avoir la possibilité de souscrire à une augmentation de capital de manière prioritaire si la société décide d’émettre de nouvelles actions.
Toutefois, il ne peut empêcher un financement extérieur s’il ne peut souscrire à l’augmentation de capital.
- Au cours de la vie de la société
Gérer l’entrée et la sortie des titres est important, mais organiser les rapports entre actionnaires, au cours de la vie de la société, l’est tout autant. Pour cela, il conviendra, pour les actionnaires parties à la convention, de prévoir certaines modalités de gouvernance et de contrôle des pouvoirs.
- Organes de contrôle
Afin de maîtriser les décisions qui vont être prises par la société, le pacte peut préciser les conditions dans lesquelles les dirigeants de l’entreprise sont nommés, révoqués ainsi que les modalités de rémunération. Il est toujours bon de rappeler que ces dispositions ne sont opposables qu’aux signataires de la convention. De ce fait, les actionnaires vont s’engager à décider de manière coordonnée et similaire sur ces points et ainsi avoir plus de latitude pour « imposer » leurs décisions.
Le pacte peut et doit aussi prévoir la limitation des pouvoirs du ou des dirigeants et le type de décisions qui peuvent ou doivent être contrôlées par un organe, un comité ad’hoc, mis en place à cet effet et permettant à certains actionnaires de mieux contrôler au quotidien, pas seulement sur une situation bilantielle.
- Résolution des conflits
Il est essentiel de prévoir comment régler les conflits entre actionnaires signataires du pacte. Pour conserver des rapports toujours plus harmonieux, prévoir des modes amiables de règlement des différends, comme une médiation ou une conciliation, est intéressant.
- Prévoir sa sortie du capital
Enfin, prévoir les modalités de cession des titres de la société est fondamental car implique la structure du capital et donc la stabilité de l’entreprise.
- Clause de drag-along
Cette clause permet la cession forcée d’actions. Dans le cadre d’une cession globale de l’entreprise, les actionnaires (le plus souvent minoritaires) sont forcés de céder leurs actions en même temps que tout le monde. De cette manière, on évite une situation dans laquelle certains actionnaires empêchent une cession de 100 % du capital de la société.
- Clause de tag-along
Les actionnaires minoritaires vont pouvoir se joindre à la cession de titres des actionnaires majoritaires. De cette façon, ils vont pouvoir vendre leurs titres au même moment et dans les mêmes conditions. Cette clause permet également d’éviter de s’associer avec un potentiel actionnaire majoritaire que l’on n’a pas choisi.
- Clauses de Good et Bad leaver
Ces clauses vont généralement concerner les actionnaires ayant des fonctions opérationnelles au sein de la société : mandats sociaux, administrateurs, membres du directoire…
Le bad leaver consistera à « sanctionner » l’actionnaire démissionnant de sa fonction ou quittant la société avant la date prévue par le pacte. Les autres associés rachèteront ses parts à un prix qui sera minoré.
Il peut exister une foultitude de situations différentes, permettant de prévoir des bads leavers avec des décôtes très différentes, des medium leaver …
Le pacte d’actionnaires est donc un document des plus important car régissant, beaucoup plus que les statuts de la société, le sort des actions détenues. Il est donc indispensable de le faire relire par un professionnel, NMCG se tient à votre disposition.
- Clauses pactes d’actionnaires
Entrée au capital
– Clause d’agrément
– Clause de préemption
– Clause anti-dilution
– Clause d’inaliénabilité
Au cours de la vie de la société
– Clauses relatives à la répartition des pouvoirs des organes de la société
– Clauses relatives au droit de vote : clause de majorités et quorums, pacte de votation, clause de blocage
– Clauses relatives au droit applicable et au règlement des différends (arbitrage, médiation, conciliation)
– Clauses relatives à la protection de l’activité de la société (non-concurrence, non sollicitation et débauchage)
– Clauses relatives à la répartition des bénéfices
– Clause de confidentialité
Sortie du capital
– Clauses de sortie conjointe (drag-along et tag-along)
– Clause de reprise d’actif
– Clauses de good, medium et bad leaver
– Clause d’option d’achat ou de vente
– Clause d’exclusion
– Clause de démission