Programmes électoraux et rétroactivité fiscale : quand les principales mesures annoncées pourraient-elles s’appliquer ?

Écrit le
27 juin 2024

En droit français, l’article 2 du code civil prévoit que  » La loi ne dispose que pour l’avenir ; elle n’a point d’effet rétroactif « . Mais cette disposition n’a qu’une valeur législative qui s’impose au juge mais non au législateur.

Ces dernières années, le recours fréquent à des dispositions fiscales rétroactives – notamment via les lois de finances de fin d’année – a fait naître un sentiment d’insécurité chez les citoyens et opérateurs économiques.

La liberté est une condition essentielle au bon fonctionnement et au développement de l’économie d’un pays. Cette liberté repose sur la confiance dans les lois et le respect de la parole de l’État. Qu’ils souhaitent acquérir un patrimoine, embaucher, investir ou épargner, les ménages et les entreprises doivent pouvoir connaître leurs droits et obligations et fonder leurs décisions sur des règles stables, claires et précises.

Dans le cadre de l’élection à venir, plusieurs mesures fiscales ont été annoncées, notamment par le Nouveau Front Populaire (« NFP »). Comme par le passé, une incertitude existe quant à la date d’applicabilité de ces mesures, qui pourraient pour certaines s’appliquer aux revenus déjà perçus depuis le 1er janvier 2024 => c’est la « petite » rétroactivité fiscale.

 

  • Suppression de la flat tax (prélèvement forfaitaire unique) sur les revenus financiers : dividendes et plus-values sur titres

En l’état actuel de la jurisprudence du Conseil Constitutionnel, cette suppression pourrait s’appliquer aux revenus de ce type perçus par les actionnaires personnes physiques à compter du 1er janvier 2024 (si la suppression est votée avant le 31 décembre 2024 au plus tard).

Si la suppression est votée en 2025, elle ne pourra s’appliquer qu’aux revenus perçus à compter du 1er janvier 2025.

A titre de rappel, la flat tax ne concerne que les revenus des personnes physiques. L’imposition des dividendes et plus-values réalisées par les entreprises, et notamment le régime mère-fille, ne serait pas modifiée.

 

  • Rétablissement de l’impôt sur la fortune (« ISF »), complété par un volet climatique

L’ISF a été supprimé en 2018 et remplacé par l’IFI (impôt sur la fortune immobilière). Cet allègement de la fiscalité du patrimoine visait à juguler l’exil fiscal des ménages très aisés car l’ISF n’existe pas dans la plupart des autres pays.

Ce rétablissement pourrait intervenir « dès 2024 », avec inclusion de l’outil professionnel dans ce nouvel ISF (contrairement à ce qui existait avant 2018).

Selon la formulation du texte, le Conseil Constitutionnel pourrait cependant s’opposer à une instauration en cours d’année, ce qui repousserait l‘application effective à 2025.

 

  • Barème de l’impôt sur le revenu à 14 tranches

Le barème de l’impôt sur le revenu (« IR ») compte actuellement cinq tranches (de 0% à 45%) :

Dans son programme, le Nouveau Front Populaire propose de rendre ce barème plus progressif, en passant à 14 tranches. Cette disposition se trouvait déjà dans le programme de Jean-Luc Mélenchon pour l’élection présidentielle de 2022.

Mesurer les conséquences de ce changement de barème est impossible à ce stade. Tout dépend des paramètres choisis (seuils des tranches, taux d’imposition, entre autres), mais aussi d’autres mesures susceptibles d’être prises en lien avec une telle réforme.

Dans un amendement au projet de loi de finances pour 2022, LFI proposait un tel barème (14 tranches) allant de 1% pour la première tranche, puis de 5% à 60% par paliers de 5% pour les 18 tranches suivantes, avec une dernière tranche à 90%.

Jamais, au cours des 50 dernières années, le barème de l’impôt n’a connu un taux marginal d’imposition aussi élevé. Il est fort probable que le Conseil constitutionnel juge une telle disposition contraire à la constitution, du fait de son caractère confiscatoire. Toujours au cours des cinq dernières décennies, le barème a compté 14 tranches au début du premier septennat de François Mitterrand (1982-1985), avec un taux marginal à 65%, et 13 tranches de 1974 à 1981 (de 0% à 60%) et de 1986 à 1992.

Cette disposition, si elle est votée avant le 31 décembre 2024, s’appliquerait aux revenus 2024 (i.e. perçus du 1er janvier au 31 décembre 2024).

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